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27.06.2023

Reprise de Credit Suisse – Retour sur les événements politiques

La reprise de Credit Suisse par UBS ne laisse personne indifférent. Des questions surgissent dans le grand public, l’administration et surtout les milieux politiques. L’heure est venue de faire le point.

Depuis le 19 mars 2023, la place financière suisse est au centre de l’attention sur la scène nationale et internationale. La reprise de Credit Suisse par UBS ne laisse personne indifférent. Pour beaucoup d’entre nous, il est incontesté que la place financière suisse joue un rôle majeur dans notre pays et dans le système financier international. Toutefois, les crises amènent souvent à s’interroger sur la situation présente afin d’éviter qu’elle se reproduise à l’avenir. Avant même qu’une analyse approfondie et sans a priori des événements ait été effectuée, les milieux politiques ont multiplié à l’envi les exigences les plus diverses. La place financière doit donc se préparer à une succession de «vagues d’exigences politiques» qui déferlera sur elle pendant la phase d’analyse. On perd en visibilité, tandis que la complexité ne cesse de s’accroître. Dans ce contexte, il est grand temps de revenir à tête reposée sur les événements politiques intervenus depuis le 19 mars 2023.

La session extraordinaire d’avril

Après le 19 mars, date à laquelle Credit Suisse et UBS ont trouvé une solution en collaboration avec l’administration fédérale, la FINMA et les milieux politiques, les exigences politiques ne se sont pas fait attendre longtemps et elles ont débouché – en raison notamment du crédit d’urgence décidé par le Conseil fédéral – sur une session extraordinaire. C’est dans ce cadre qu’ont été prises les décisions concernant le crédit supplémentaire ainsi que plusieurs postulats. Les bureaux des Conseils ont refusé en revanche que des initiatives antérieures soient examinées.

Le crédit d’urgence que le Conseil fédéral et la Commission des finances ont accordé à Credit Suisse à compter du 19 mars, a été au centre des débats. Il devait en effet être approuvé formellement par le Parlement a posteriori, même si cette décision n’avait de fait plus aucune incidence. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles le Parlement, après de longues tergiversations, l’a rejeté.

Au préalable, les Commissions de l’économie et des redevances ainsi que celles des affaires juridiques des deux Chambres avaient déposé plusieurs postulats. Ceux-ci visaient à éclairer les circonstances qui ont précédé et entouré la reprise de Credit Suisse ainsi qu’à formuler des exigences de réglementation envers la place financière. Tous les postulats ont été adoptés par les Chambres concernées et transmis au Conseil fédéral. Ce dernier avait déjà annoncé qu’il procéderait à une analyse des événements, et il répondra aux postulats au vu des résultats obtenus.

Objets déposés et examinés lors de la session extraordinaire 
  • Postulat 23.3438 Recours au droit de nécessité (CN) – adopté
  • Postulat 23.3439 Examen d’une possible action en justice à l’égard des organes dirigeants de Credit Suisse (CN) – adopté
  • Postulat 23.3440 Applicabilité de la réglementation «too big to fail» pour les grandes banques internationales (CN) – adopté
  • Postulat 23.3441 Diverses questions à examiner (CE) – adopté
  • Postulat 23.3442 Diverses questions à examiner (CN) – adopté
  • Postulat 23.3444 Fusion UBS-Credit Suisse. Evaluation de l’importance du point de vue du droit de la concurrence et de l’économie nationale (CN) – adopté
  • Postulat 23.3443 Avenir de la place financière suisse (CN) – adopté
  • Postulat 23.3445 Examen des instruments de la BNS (CN) – adopté
  • Postulat 23.3446 Reconsidérer et modifier la réglementation «too big to fail» pour les cas de panique bancaire et autres événements (CN) – adopté
  • Postulat 23.3447 Analyse des facteurs déterminants susceptibles d’avoir conduit à la faillite de Credit Suisse (CN) – adopté

La session spéciale de mai et les initiatives antérieures

Début mai, la reprise de Credit Suisse était toujours le sujet phare au Palais fédéral. A examiner de plus près la session spéciale (qui se serait tenue de toute façon, indépendamment de la reprise de Credit Suisse), on constate que le Parlement s’était déjà penché précédemment sur la question des rémunérations sur la place financière et sur celle du régime too big to fail. Les deux motions concernant les primes et les exigences de fonds propres, déposées dès 2021 par la Conseillère nationale Birrer-Heimo, ont ainsi été adoptées. Mais la session spéciale a aussi été l’occasion de déposer d’autres motions, qui seront débattues lors des sessions à venir.

Objets déposés et examinés lors de la session spéciale 
  • Motion 21.3909 Birrer-Heimo. Banques d’importance systémique. Interdire le versement de primes aux étages supérieurs de la hiérarchie – adoptée
  • Motion 21.3910 Birrer-Heimo. Renforcer les exigences de fonds propres pour les banques d’importance systémique globale – adoptée
  • Motion 23.3460 Ryser. Lier garanties d’Etat pour les banques et durabilité – déposée
  • Motion 23.3452 Stark. Limitation des rémunérations dans le secteur bancaire – déposée
  • Motion 23.3456 Groupe de l’UDC. Plus aucune banque suisse trop grande pour faire faillite – déposée
  • Motion 23.3451 Minder. Membres des organes et preneurs de risques des banques d’importance systémique. Fixer des composantes variables du salaire appropriées – déposée
  • Motion 23.3475 Groupe des Vert·e·s. Des aides publiques en accord avec les objectifs de développement durable de la Suisse – déposée
  • Motion 23.3476 Groupe des Vert·e·s. Prendre en compte les risques liés au climat et à la biodiversité dans les prescriptions relatives aux capitaux propres – déposée
  • Motion 23.3477 Groupe des Vert·e·s. Pour une meilleure garantie des dépôts – déposée
  • Motion 23.3474 Glättli. Séparer de l’UBS les activités suisses de l’ancien Credit Suisse pour créer une banque climatique d’intérêt général – déposée
  • Motion 23.3478 Groupe des Vert·e·s. Banques d’importance systémique. Séparer les activités bancaires – déposée
  • Motion 23.3449 Chiesa. Plus aucune banque suisse trop grande pour faire faillite – déposée
  • Motion 23.3458 Porchet. Lier les garanties d’Etat pour les banques à des critères sociaux – déposée
  • Motion 23.3479 Groupe des Vert·e·s. Rémunération de la garantie de l’Etat – déposée
  • Motion 23.3448 Chiesa. Entreprises d’importance systémique. Garantir que les décisions soient prises dans l’intérêt de la Suisse – déposée
  • Motion 23.3455 Groupe de l’UDC. Entreprises d’importance systémique. Garantir que les décisions soient prises dans l’intérêt de la Suisse – déposée
  • Motion 23.3461 Estermann. Place financière suisse. Régler durablement le problème des banques d’importance systémique – déposée
  • Motion 23.3462 Burgherr. Banques d’importance systémique. Renforcer la responsabilité des cadres supérieurs – déposée
  • Motion 23.3494 Sommaruga. Banques d’importance systémique. Interdire le versement de primes aux étages supérieurs de la hiérarchie – déposée
  • Motion 23.3492 Atici. Renforcer la Finma – déposée
  • Motion 23.3495 Noser. Pour une réglementation des rémunérations variables – déposée
  • Motion 23.3483 Suter. Prévoir une rémunération de la garantie implicite de l’Etat par les banques d’importance systémique – déposée
  • Motion 23.3487 Romano. Affaire de Credit Suisse. Examiner toutes les mesures possibles pour préserver les emplois en Suisse – déposée
  • Motion 23.3488 Badran. Droit de préemption sur les immeubles ayant appartenu à Credit Suisse et appartenant désormais à UBS – déposée
  • Motion 23.3485 Fischer. Clarifier la notion d’importance systémique, rémunérer la garantie implicite de l’Etat et créer à cet effet un fonds de garantie – déposée

La commission d’enquête parlementaire (CEP)

La décision d’instituer une commission d’enquête parlementaire (CEP) et le large soutien dont elle a bénéficié constituent le point culminant des événements autour de la reprise de Credit Suisse. Cette décision a été prise par les deux Chambres de l’Assemblée fédérale lors de la session d’été. En relation avec la reprise de Credit Suisse par UBS, la CEP analysera la gestion du Conseil fédéral, de l’administration fédérale et des autres organes ou personnes auxquels sont confiées des tâches de la Confédération au cours des dernières années. Ses membres verront sans aucun doute l’attention du public se focaliser sur eux pendant les mois et les années à venir, ce qui est loin d’être un désavantage en période électorale.

Outre la CEP, diverses motions concernant les rémunérations variables et la question des banques et entreprises d’importance systémique ont été débattues pendant la session. Toutes ont été renvoyées en commission en vertu d’une motion d’ordre. Elles devraient donc être examinées par la CER-E à l’automne prochain.

Objets déposés et examinés lors de la session d’été 
  • Motion 23.3217 Minder. Place financière suisse. Régler durablement le problème des banques d’importance systémique – renvoyée en commission
  • Motion 23.3448 Chiesa. Entreprises d’importance systémique. Garantir que les décisions soient prises dans l’intérêt de la Suisse – renvoyée en commission
  • Motion 23.3449 Chiesa. Plus aucune banque suisse trop grande pour faire faillite – renvoyée en commission
  • Motion 23.3451 Minder. Membres des organes et preneurs de risques des banques d’importance systémique. Fixer des composantes variables du salaire appropriées – renvoyée en commission
  • Motion 23.3452 Stark. Limitation des rémunérations dans le secteur bancaire – renvoyée en commission
  • Motion 23.3494 Sommaruga. Banques d’importance systémique. Interdire le versement de primes aux étages supérieurs de la hiérarchie – renvoyée en commission
  • Motion 23.3495 Noser. Pour une réglementation des rémunérations variables – renvoyée en commission

Perspectives

L’ASB a soutenu d’emblée une analyse indépendante, exhaustive et sans a priori des événements, qui implique tous les acteurs concernés. Une connaissance précise de la situation et des processus est en effet indispensable pour formuler des recommandations en vue d’améliorer la réglementation et d’établir les responsabilités. La mise en place d’une CEP, ainsi que l’institution d’un groupe d’expert·e·s par le Conseil fédéral, devraient permettre d’atteindre ces objectifs. Un premier rapport du Conseil fédéral est annoncé pour le début de l’année 2024. Dans l’intervalle, il convient d’attendre les conclusions des expert·e·s et de s’abstenir de toute décision réglementaire hâtive. Mais à l’approche des élections, il y a fort à parier que les politiciennes et les politiciens du Palais fédéral souhaiteront émettre encore l’un ou l’autre signal avant que la nouvelle législature prenne le relais à l’hiver 2023.

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