Rapatrier les affaires en Suisse
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Le 25 septembre prochain, c’est justement l’un de ces projets qui est soumis au verdict des urnes: celui de la réforme de l’impôt anticipé, qui permettra à notre pays d’aller de l’avant. En votant «oui», nous nous débarrassons d’une entrave qui freine la Suisse depuis plusieurs années. Le fonctionnement de notre marché des capitaux est aujourd’hui insatisfaisant, car la Suisse renonce sans nécessité à un immense potentiel, malgré son statut de place financière d’envergure internationale. La responsabilité en incombe à l’impôt anticipé sur les obligations, une spécificité helvétique. De nombreuses entreprises émettent aujourd’hui leurs obligations à l’étranger, où les investisseurs peuvent les acquérir sans devoir payer ce type de taxe. C’est précisément ici que la réforme intervient. Elle supprime l’impôt anticipé sur les obligations et donne à la Suisse l’opportunité de rapatrier les affaires qui se sont de plus en plus déplacées vers des pays comme le Luxembourg ces dernières années.
La réforme aboutira à une création de valeur accrue, à de nouveaux emplois et à une hausse des recettes fiscales en Suisse. La récente étude de BAK Economics confirme elle aussi ces effets favorables et conclut à un rapport coût/utilité clairement positif. Pour la place économique suisse, cela signifie par exemple que les green bonds (obligations dites vertes, car elles permettent de financer des projets durables) pourront être émises à un prix beaucoup plus avantageux, ce qui favorisera une augmentation de ces émissions obligataires en Suisse. En comparaison internationale, notre pays est aujourd’hui malheureusement à la traîne. Selon des données récentes, plus de 1300 obligations vertes ont déjà été émises au Luxembourg, pour un équivalent de quelque 700 milliards d’euros. Avec environ 75 obligations vertes et un volume de 24 milliards de francs, la Suisse ne fait de loin pas le poids. La réforme peut toutefois changer la donne.
Les pouvoirs publics profiteront également d’un financement moins onéreux, car la réforme abaisse sensiblement la charge des intérêts. Une analyse de la Confédération montre que le secteur public pourrait à lui seul profiter d’une économie de 60 à 200 millions de francs grâce à la baisse de la charge des intérêts. Et ces statistiques n’incluent pas encore les entreprises du secteur public, comme les fournisseurs d’énergie, les hôpitaux ou les transports publics. La réforme permettrait à ces entités de bénéficier de meilleures conditions, notamment pour financer des projets d’infrastructure essentiels. Autre élément décisif: la pertinence de la réforme dans une période de hausse des taux. Dans le système actuel de l’impôt anticipé, des taux plus élevés rendent l’émission d’obligations encore moins attrayante, ce qui présage une hausse des émissions à l’étranger. A moins d’une réforme, le préjudice infligé à notre place économique et à notre secteur public s’accentue encore lorsque les taux augmentent. La réforme est donc d’autant plus judicieuse dans un environnement de taux élevés.
En définitive, la réforme de l’impôt anticipé renforce l’économie, allège les finances de l’Etat et facilite les investissements dans le service public. C’est une réforme modérée, puisque seules les obligations nouvellement émises seront exonérées. L’impôt anticipé restera en place pour les dividendes et les intérêts des comptes (soit largement plus de 90 % du volume de l’impôt), la fonction de garantie est donc maintenue.
Une chose est certaine: la Suisse fait l’objet d’une pression grandissante au sein de la concurrence fiscale internationale. C’est précisément dans ce contexte que la réforme de l’impôt anticipé aide notre pays à préserver sa compétitivité, malgré la réforme fiscale de l’OCDE et l’imposition minimale qu’elle prévoit. Le texte soumis à la votation renforce la Suisse. Une fois de plus, c’est à l’esprit d’entreprise helvétique de jouer.