Opinions
22.04.2021

Voie bilatérale avec l’UE: cruciale pour les banques aussi

Les relations entre la Suisse et l’Union européenne (UE) sont à la croisée des chemins. La voie bilatérale pourra-t-elle être poursuivie, ou de sérieuses régressions sont-elles à craindre? Le week-end dernier, l’économie a appelé à régler les questions en suspens en ce qui concerne l’accord-cadre. L’Association suisse des banquiers (ASB) reste elle aussi favorable à la conclusion d’un bon accord-cadre. Un échec des négociations et de nouveaux atermoiements ne sont pas envisageables. Les enjeux sont également de taille pour les banques et la place financière. Tous les regards sont braqués sur le Conseil fédéral.

L’ASB estime toujours que les questions en suspens sur lesquelles le Conseil fédéral a demandé des clarifications dans sa lettre à la Commission européenne du 9 juin 2019 (protection des salaires, aides d’Etat, directive sur la citoyenneté européenne) peuvent être résolues  – mais cela nécessite une ferme volonté politique. La balle est aujourd’hui dans le camp du Conseil fédéral. Au-delà des trois thèmes précités, le débat politique et public actuel porte toutefois de plus en plus sur un certain nombre de sujets non expressément abordés dans cette lettre, en particulier la souveraineté et le rôle de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans la résolution des litiges. Hélas, dans le grand public, les sceptiques sont quasiment les seuls à faire entendre leur voix, et ils avancent des arguments souvent à l’emporte-pièce et (trop) simplistes.

Mieux valoriser les avantages

Or, des arguments objectivement solides permettent notamment de replacer la question des limitations de souveraineté dans son véritable contexte, de justifier les approches du projet d’accord institutionnel telles qu’elles ont été négociées et de relativiser les inquiétudes à ce sujet. Dans le cadre des accords bilatéraux, jugés majoritairement positifs par la population et les milieux économiques, la Suisse en tant qu’Etat tiers participe déjà dans une certaine mesure au système juridique de l’UE. L’écart entre l’application «autonome» qui a cours actuellement et la reprise «dynamique» prévue n’a rien de rédhibitoire. On a d’ailleurs tendance à oublier que l’obligation de reprise du droit européen concerne uniquement le domaine restreint des accords bilatéraux qui entrent ou entreront dans le champ d’application de l’accord institutionnel. L’accord-cadre prévoit enfin – et c’est nouveau – une participation de la Suisse à l’élaboration des textes législatifs européens. Certes, le réalisme conduit à penser que notre pays n’aura pas un poids énorme en la matière, mais il en aura toujours plus que jusqu’à présent. Ce ne sont là que des exemples visant à montrer que dans ce débat, il faudrait désormais mettre en lumière les avantages plutôt que les limitations réelles et potentielles. Q uoiqu’il en soit, tout traité suppose des concessions, c’est même la raison d’être de ces actes juridiques. En l’absence d’accord institutionnel, l’UE n’acceptera pas de poursuivre sur la voie bilatérale et c’est alors un dispositif performant qui menacera de s’effondrer.

Le facteur temps n’est pas à négliger dans ce dossier. Certains appellent à une «pause de réflexion». Mais il faut se méfier du chant des sirènes: il faut trouver des solutions au plus vite afin de rétablir la sécurité de planification. Parviendrions-nous à un meilleur résultat avec l’UE en attendant encore, rien n’est moins sûr.

Un bon accord-cadre est essentiel pour le secteur bancaire

L’ASB conserve une opinion positive quant au projet d’accord institutionnel dans sa globalité. Certes, les questions d’accès au marché spécifiques au secteur bancaire ne sont pas directement liées à l’accord-cadre. Mais sans accord-cadre, les faire valoir efficacement à Bruxelles le moment venu risque d’être difficile. Une amélioration de l’accès au marché est toutefois importante pour permettre aux banques d’exporter leurs services, en particulier dans le domaine de la gestion de fortune, où les banques suisses sont et doivent rester des leaders. Les banques font en outre partie intégrante de l’économie et elles accompagnent les entreprises exportatrices de notre pays dans d’autres compartiments de leur activité.

En cas d’échec de la voie bilatérale, la place financière risque de perdre certains des atouts qui font sa force. C’est pourquoi l’ASB, au nom du secteur bancaire, reste favorable à la conclusion d’un accord-cadre.

Rédacteurs

Roberto Battegay
Senior Advisor International
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